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article publié en 2011
Nouveau départ, nouvelles décisions… Les questions fusent sur tous les aspects de la nouvelle vie en poste et bien sûr le sujet de la scolarité des enfants s’impose comme primordial. Nombre de fois ai-je eu des dialogues avec des parents déroutés, indécis et/ou enthousiastes. « Comment conserver une continuité dans notre vie de nomade ? Comment encourager une ouverture sur un autre monde culturel ? Pouvons-nous offrir à nos enfants l’opportunité de devenir bilingues ? ». Il n’y a pas de bonne réponse. Il n’y a que des bonnes questions et des choix différents à poser pour chaque enfant. Chaque choix étant un pari.
Un système scolaire est une institution qui a pour but premier de perpétuer la culture dont elle est issue. « Après trois ans d’école publique américaine, notre fils était devenu anglophone, mais d’abord et avant tout américain. Il en avait adopté les valeurs, les archétypes, le mode de communication, le mode de relation à l’adulte et à la hiérarchie. Il nous a fallu l’accepter, puisque nous avions fait le choix de l’immersion linguistique ! Nous sommes devenus, de fait, une famille biculturelle ».
Choisir de mettre un enfant dans une école étrangère (à notre culture) nécessite une maitrise minimale de la langue, ainsi que la connaissance et l’adhésion aux valeurs culturelles. Je me souviens d’un jeune enfant qui après deux ans d’école américaine, ne parlait toujours pas anglais ! Après un très court échange, la mère me confia qu’elle ne se plaisait pas dans ce pays. En réalité, cet enfant avait intégré les griefs de sa mère, et faisait en sorte de surtout ne pas devenir américain, et ainsi continuer à se faire aimer d’elle ! Pour se construire, nos enfants ont besoin de cohérence.
« Après un passage en France, où nos enfants sont « enfin » devenus français, nous sommes repartis vers un pays anglophone où il y avait une école internationale. Quelle joie pour eux de pouvoir enfin reparler anglais ; « J’ai l’impression de redevenir moi-même ! » nous a confié notre fille dès les premiers jours. En France nous avions fait le choix de l’immersion scolaire française puisque nous savions qu’il y aurait un retour en milieu anglophone ». Apprendre une langue par immersion n’est pas une expérience passagère. Une langue est une part constitutive de l’identité d’un enfant et son apprentissage doit s’intégrer dans un projet éducatif au long terme.
Le choix d’une éducation répond à de multiples critères, la personnalité de l’enfant n’étant pas le moindre. Un enfant extraverti et communicatif peut vivre les débuts de l’immersion dans une langue inconnue comme un enfermement. Il devra alors être accompagné avec soin par les parents et par l’équipe enseignante. Par contre, un enfant introverti s’accommodera plus facilement de rester silencieux plusieurs semaines, avant de pouvoir commencer à communiquer verbalement. De même, la langue de l’apprentissage de la lecture peut avoir une valeur symbolique différente selon les membres d’une même fratrie. Je me souviens de ces parents qui avaient courageusement donné ce choix à leurs jeunes enfants. Le plus jeune choisit d’apprendre à lire en français, l’autre en anglais. Ces choix se comprenaient au regard de l’itinéraire de chacun ; l’un avait besoin de construire son identité de français, alors que pour l’autre, cette identité était déjà bien ancrée. D’autre part, lorsqu’un enfant présente des difficultés d’apprentissage comme la dyslexie, la continuité dans le parcours scolaire est à privilégier, dans la mesure du possible.
Nos enfants ne sont pas des laboratoires. J’ai connu des parents qui avaient organisé pour leur fils de 4 ans un environnement avec 5 langues. « Vous comprenez, les enfants sont des éponges !...». Une rencontre avec ces parents a suffi pour déplacer leur peur de ne pas être de « bons parents » vers leur désir d’aider leur enfant à construire son identité.